Tectonique des consommations

L’Insee vient de publier les données détaillées de la consommation des ménages français en 2023. Derrière une progression atone (+0,8 % corrigé de l’inflation), ces chiffres mettent en lumière des évolutions profondes des comportements de consommation suite à la fin de la pandémie et en réponse à la résurgence d’inflation.

Afin de lire “au travers” des effets strictement liés aux mesures sanitaires de 2020-21, nous optons pour une approche visuelle consistant à suivre les volumes de consommation en prenant pour base 100 leurs niveaux pré-pandémie (2019).

Une déformation majeure du panier alimentaire sous l’effet de l’inflation

Le poste alimentaire est, avec l’énergie, celui qui a subi la plus forte inflation depuis la fin de la pandémie. En réponse à ce phénomène, et bien qu’il soit à la base des besoins de la pyramide de Maslow, le panier alimentaire s’est profondément déformé.

Après un pic de consommation en 2020 - qu’il faut lire en mirroir de la baisse de fréquentation des restaurants - on assiste pour la deuxième année consécutive à un transfert massif des produits les plus chers (poissons, viandes, légumes) ou non-essentiels (boissons, tabac) vers les produits les moins coûteux (pains et céréales selon la catégorie Insee, qui inclut pâtes, riz, maïs, couscous, farine, etc).

La consommation de poissons, crustacés et autres fruits de mer est ainsi inférieure de 17 %, en volume, à son niveau de 2019. Viandes et légumes (y compris légumes secs tels que lentilles et pois) sont en baisse d’environ 10 %. D’autres études telles que celle d’Interfel montrent que la consommation de fruits et légumes bio ont été très lourdement touchés (-23 % vs 2019).

Les professionnels de santé s’accorderont sur le fait qu’une telle évolution, si elle permet de préserver les apports caloriques, constitue un appauvrissement inquiétant sur le plan nutritionnel.

Une consolation néanmoins sur le plan de la santé : les boissons alcoolisées et le tabac sont respectivement en recul de 6 % et 16 % par rapport à 2019.

Le retour des loisirs et du voyage

Les autres domaines de consommation montrent des situations très contrasteés.

Le secteur de l’informatique et de la communication est le seul à ne pas avoir été affecté, en volume, par la pandémie ou le retour de l’inflation.

La restauration et l’hôtellerie, après le creux de 2020-21, rebondissent de façon très dynamique (+16 % vs 2019). Idem, dans une moindre mesure, des loisirs, des sports et de la culture (+5 % vs 2019).

Le secteur des services de transport (train, avion et autres transports collectifs), le plus violemment touché par la pandémie (-52 % vs 2019), se redresse tout en restant 5 % en dessous de son niveau de 2019.

Enfin, l’électricité et le gaz, l’habillement et l’ameublement font de toute évidence les frais des arbitrages budgétaires des ménages en réponse à l’inflation avec des baisses respectives, en volumes, de 10 %, 8 % et 3 % par rapport à leur base de 2019.

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Sources et bibliographie